lundi 14 novembre 2016

Cusco

C'est donc en ce dernier jour d'Octobre que j'ai finalement mis les pieds à Cusco. Après un long dernier col franchi avec brio en "truck surfing", je profite de cette dernière descente lorsque au gré des courbes asphaltées, la cité se dévoile.

Il est toujours très agréable de découvrir une ville par le haut, d'en saisir sa géographie, la manière dont elle épouse les courbes géologiques, sa façon de se lover sur les contreforts. Et cela permet de découvrir les quartiers périphériques avant de rentrer avec force dans les quartiers plus touristiques.




Car oui Cusco est une ville très touristique, la première du pays. Je vous ferai grâce de son passé historique avec les Incas, ceux que ça intéresse trouveront par eux-même les infos.

Mais je dois dire que lorsque je me pose sur la Plaza de Armas, je suis content de voir quelques têtes "familières", comprenez des "Occidentaux". Les t-shirts " I love NY" côtoient les sac à dos et casquettes de montagne, tandis que mes yeux ne peuvent que constater une forte concentration de mini-short dont la densité au mètre carré doit affoler les statistiques du ministère péruvien des moeurs et conduites. Ce n'est sans commune mesure avec tout le reste du pays, il faut dire que les péruviennes auraient un problème d'ordre physique à vouloir essayer de faire évoluer les chiffres.

Je loge dans une petite auberge "L'Estrellita", adresse bien connue des cyclistes et motards au long cours, sorte de QG où tout le monde se retrouve pour échanger les bons plans passés et à venir.



Il ne faudra pas longtemps avant que je ne fasse la connaissance de Pablo et Orlando deux argentins, d'un Autralien en solo, d'un Suisse (bûcheron et qui fait du ski de rando) qui me dit rejoindre sa copine par morceaux car elle fait Alaska-Ushuaïa et après 20 minutes de palabres s'apercevoir que je l'ai déjà rencontrée il y a 1500 km de ça à Huaraz. Il y a aussi un français et un australien à moto....bref pas mal de monde et ça fait bien plaisir.




Je prévois de rester 3 ou 4 jours à flâner et me reposer dans cette ville qui est fort agréable il faut bien le dire. De jolis petits quartiers aux facades blanches et aux escaliers interminables surplombant la ville en passant par les rues typiques aux étals bariolés et autres terrasses ensoleillées.

C'est en revenant à l'auberge un après-midi que je vois 2 vélos sur la place principale, et je ne peux qu'engager la conversation. Marianne et Damien sont belges, de Bruxelles et viennent de faire la même route que moi. Sans le savoir, nous avons roulé à 2ou 3jours d'écart.
Je leur montre le chemin vers l'auberge car ils avaient eux aussi prévu d'y aller.

Nous passerons 2 jours souvent ensemble à se remémorer de bons souvenirs de la Belgique où j'ai passé 5 ans pour les études, et comme il se trouve qu'ils connaissent assez bien les Alpes finalement le courant passe tout de suite.

Repas pâtes/bière, petits-déj dans la cour, atelier maintenance des vélos et petites visites de la ville.

En parlant de visites, je me dois d'écrire quelques lignes sur ma volonté de ne pas être allé au fameux Machu Pichu, ogre monumental, une des 7 merveilles du monde qui cristallise à lui-seul l'ensemble des conversations des personnes de passage à Cusco.

Avant toute chose, cet avis n'est que le mien et ne reflète en aucun cas une vérité, mais simplement mon ressenti.

Avant toute chose, il ne faudrait pas croire que l'aspect financier a été le seul élément qui a fait pencher la balance, mais je ne peux nier le fait qu'il ai grandement contribué.

Groso modo une visite standard de ce monument historique coûte dans les 200 euros par personne, même si nous le verrons plus tard il y a moyen de s'en tirer pour 120/140 euros. Ce n'est pas rien.
A ce prix là, j'estime que l'on commence à rentrer dans un budget sérieux et qu'il faut être vraiment motivé. C'est bien là que le bât blesse. Je ne l'étais absolument pas assez.

Il serait tellement mensonger d'affirmer que je suis un pasionné d'histoire, amoureux des civilisations antiques et de leur passé chargé de merveilles architecturales. Il n'en est rien. Je ne conteste en rien l'absolue magnificience du lieu et les prouesses techniques pour le réaliser, surtout dans le contexte de l'époque. Seulement moi, j'ai du mal à m'emballer pour ça.
Et je considère que c'est le plaisir qui doit me guider majoritairement, quitte à ne pas "faire" ce que beaucoup considèrent comme des incontournables.

Ainsi la véritable question à se poser ne serait-elle pas plutôt : Qu'est ce qui permet de définir un voyage épanouissant pour soi ? Mais aussi se doit-on de ne passer que par les "gros points chauds" de chaque pays en étant enfermés dans une sorte de corridor touristique bien établi ?
Mon passage au Pérou sera t-il invariablement raté car "quoi Julien tu étais à Cusco et tu n'as pas fait le MAchu Pichu ? Mais non enfin.... !"

Et puis, les centaines d'agences qui vous alpaguent dans la rue "Machu Pichu amigo", finissent de me convaincre. Je préfère être un vieux loup solitaire qu'un pigeon au collier doré.
Il est d'ailleurs surprenant de constater l'intérêt archéologique soudain de toute une frange de personnes, alors que bon nombre de sites sur la route étaient absolument déserts.
Alors, en vrai, combien de gens s'intéressent vraiment de très prés aux civilisations pré-colombiennes, hein, entre nous ?
(Mais bon...il faut bien pouvoir replacer lors des dîners moi j'ai fait la grande Muraille de Chine, moi j'ai fait le Taj Mahal...).
Il y a une sorte de Disneylandisation qui me donne le tournis. Comme si le monde était un parc d'attractions immense dont il fallait cocher des cases, pour pouvoir justifier du voyage que l'on a fait et cancaner en exhibant ses trophées de guerre.

Rien que le terme "faire" d'ailleurs m'hérisse un peu les poils. C'est se donner un rôle actif lorsque la plupart du temps cela consiste à monter dans un bus et à suivre un circuit touristique bien balisé et pré-mâché avec le reste du troupeau.

Je ne pourrais cependant pas en vouloir une seule seconde aux Péruviens de vouloir profiter de cette manne financière. Il est tellement facile de se poster aux bons postes et d'attendre le chaland pour le plumer. Mais ils ont bien raison ! Quand je vois que certains ont l'audace de réserver des chambres d'hôtels à plusieurs centaines de dollars la nuit au nez de ces pauvres gens, avec lesquels ils n'hésiteront pas le lendemain à négocier 2 soles (soit 50 centimes d'euro) le prix de leur transport ou de leur bouteille d'eau.

Sans compter que les Péruviens eux-même ne reçoivent pas forcément beaucoup de retours, car par exemple la société de chemin de fer (ce tronçon est le plus onéreux du monde) a été racheté et est exploitée par une société étrangère détenant notamment l'Orient Express.

Et le prix faramineux ! Mais puisque certains sont prêts à tout pour le mettre, allons-y gaiement...

Alors certes oui, si l'on marche 3km sur les mains, puis qu'on fait le tour de soi-même en sautant 4 fois, puis que l'on court 7km sur une poutre pendant 6 heures (à moins que ce ne soit des rails), avant de finir par faire la queue puis d'être entassés comme des sardines dans un combi bondé, on peut minimiser l'effet sur le porte-monnaie et économiser quelques dollars. Beaucoup aiment à trouver ce genre de combines de routards, ça en devient presque rigolo.

Je fais l'impasse sur l'impact écologique qu'implique la surexploitation du site à différents niveaux...

Alors voilà, même s'il faut bien reconnaître que la plupart du temps les gens ne s'agglutinent pas dans les endroits les plus moches, moi ça me gonfle un peu de faire comme tout le monde.
J'ai préféré laissé toute cette mascarade, filer et faire un pas de côté une fois de plus. Je suis sans doute le dernier des crétins je n'en doute pas, je me suis posé assez longuement la question à vrai dire. Mais je réalise que ce qui me nourrit finalement lorsque je suis sur mon vélo est la banalité du quotidien de l'endroit où je suis. J'y reviendrais, mais c'est comme pour les films. J'ai toujours préféré les petits films d'auteur aux blockbusters américains.

Tout ça ne remet pas en cause la légitimité et la beauté des trésors archéologiques du pays, mais ce n'est juste pas pour moi.

1 commentaire:

  1. Ce qui ne te convient pas au final, c'est l'hypertourisme du monument ? S'il n'était au final qu'assez peu fréquenté tu y aurais fait un tour ?

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