vendredi 9 décembre 2016

Bolivie 3

Encore Gaëlle ; )

Merci encore à tous pour vos messages, c'est extra de vous lire quand on est aussi loin...
L'aventure se poursuit !
(Préparez le dessert ou le ptit dej avant d'attaquer :)
J7- 03/12
Nous quittons l'auberge. Après 2 euros le diner... 6 euros la chambre, c'est abusé :-P
Dés la sortie du village, la piste de 15km qui doit nous mener à l'entrée du salar de Coipasa se dessine.
Déja les repères changent. On commence à avoir du mal à distinguer le relief, on perd nos repères habituels. L'entrée du salar est humide on s'"ensel" :-) mais trés vite la surface se durcit et laisse place à un sel dur d'une blancheur éclatante.
Nous devons rejoindre l'ile de Coipasa car nous n'avons pas suffisamment d'eau pour les deux jours à venir. Passage sur l'ile le temps d'un déjeuner sur la place du village et d'une rencontre avec deux enfants. Quelle chance, seul jour où la marchande de fruits est sur l'ile. Mangue en dessert c'est jour de fête ;)
Nous replongeons sur le salar. Il reste 40km pour le traverser. Nous en ferons 10 pour nous retrouver entourés de sel et installer notre bivouac du soir.
Les gestes se répetent. On descend les sacoches. On pose une couverture de survie au sol, puis la tente intérieure que l'on recouvre de la tente extérieure. Malgré la dureté du sel on arrivera à planter les sardines. On gonfle nos matelas, les oreillers et installons nos sacs de couchages.
On sort le matériel de cuisine et en fonction de l'heure nous préparons un thé ou directement le dîner .
Quelle vue ! Rien ni personne. Aucune pollution sonore. L'ambiance est lunaire, le silence est ennivrant.










52km - bivouac sur salar - 3700m
J8- 04/12
Du rêve au cauchemar
5h30.Réveil et lever de soleil sur le salar de Coipasa. J'ouvre la tente. Je suis en train de tomber amoureuse de ce pays, de tout ce que m'apporte ce voyage.
Nous démontons le camp et partons parcourir les 30km de salar qu'il nous reste. Sensation de liberté infinie !
Il nous faut trouver la rampe pour sortir. La manquer c'est prendre le risque de s'embourber sur les bords plus humides du salar.
Nous voilà de retour sur la terre ferme.
Goûter et sieste express de 10mn en vrac sur le bord de la piste.
En plus des topos d'autres cyclo voyageurs, Maps.me est une appli qui nous guide depuis le début. Cet aprés-midi, nous nous trompons de piste et notre erreur va nous coûter cher. La piste est en fait un chemin de sable, où parfois même des dunes se dessinent. Personne n'est passé par là depuis des semaines.
Un vélo de 25kg dans un sable profond. Chaque poussée nous demande un effort éreintant et ne nous fait avancer que d'un mètre . Il reste 6km avant de retrouver la piste suivante. Le piège se referme sur nous. Bientôt 3km de sable derrière et encore autant devant.
Je suis épuisée. Dans une randonnée nous pouvons faire demi-tour; sur un trail nous pouvons abandonner. Ici rien ni personne ne peut venir nous aider ou nous secourir. On peut pleurer, jeter le vélo, s'assoir et attendre. Personne. Il faut avancer ! Pas le choix. Un mètre et puis encore un. Je pense à mes garçons, à la beauté du salar ce matin, aux belles surprises qui nous attendent sûrement après . Nous tenons.
Vila Victoria. 4 âmes qui vivent. Dont une a un 4X4. Épuisés nous craquons et lui demandons de nous aider pour les 20km restants.
49km - Auberge Llica - 3750m



J9- 05/12
Petit déjeuner dans la chambre. Crakers et confiture, banane, thé. Départ en ville pour faire quelques derniers achats (impossible de trouver du pain il faudra s'en passer). Assise sur le bord du trottoir une vieille dame propose des empañadas (beignets de purée de pomme de terre, carottes et lama), à 40ct pièce... deuxième petit déjeuner ! :-)
Nous devons partir, une grosse journée nous attend et surtout à l'horizon, devant le guidon.. un de nos grands rêves qui se profile...
9km de piste et nous voilà à l'entrée. Le Salar d'Uyuni !!! Le plus grand désert de sel au monde (10.000 km2).
C'est l'infini qui s'ouvre devant nous et nous encercle bientôt. Pas un 4x4 croisé pendant toute la traversée. Si j'avais la plume d'un poète je saurais vous écrire ce que nous avons ressenti.
L'ile d'Inca Huasi, où nous devons passer la nuit, se dessine comme un mirage au bout de nos roues. Elle devient réelle. Se rapproche, plus que 10km.
Elle est là, au milieu de cet océan de sel.
Contraste saisissant. Au moins 30 4x4 sont garés devant.
Nous qui n'avons croisé d'autre européen que José en 8 jours, nous nous retrouvons en quelques instants au milieu d'une foule de touristes, carte de l'ile et coca à la main. Choc. On est un peu "perdus".
Il est 17h, dans 1h, tous les 4x4 repartent et leurs occupants avec. Nous aurons l'île pour nous !!!
A 18h, un par un les 4x4 repartent. Nous croisons des Hauts Savoyards (de la Roche!) en tour du monde. Dans 2 jours ils seront à san pedro de Atacama. Avec beaucoup de courage nous y serons dans 12...
Seuls nous faisons le tour de l'île et regardons se coucher le soleil. Quel privilège !
83km - Bivouac ile Incahuasi







J10- 06/12
Le répit aura été de courte durée. A 5h, nous entendons des 4x4 arriver les uns après les autres pour débarquer une horde de gens sur l'île. Ils marchent et parlent à coté de la tente. Tous sont là pour aller voir le lever de soleil. Une centaine de personnes en l'espace de 10mn. Quand nous ouvrons la tente plus personne, ils sont tous en haut.
Depuis hier je suis bousculée. Bousculée dans ma vision du voyage. Chaque jour depuis que je voyage à vélo je réalise à coté de quoi je passe lors d'un voyage "traditionnel". Ici, sur cette île, c'est encore plus frappant. Encore une fois je comprends les moments privilégiés que nous pouvons vivre grâce à ce choix de voyager en vélo. Etre totalement libres et indépendants. Etre en contact direct avec les éléments et les personnes. Aucun filtre, aucune vitre de voiture. Une vision à 360 et un ressenti brut.
Nous rangeons les affaires, démontons la tente, rechargeons en eau. A 8h les touristes ont à nouveau quittés l'île. Je m'offre un café avant de partir et m'asseois autour de cette petite table en bois.
C'est là qu'Alfredo viendra s'asseoir avec moi, bientot rejoins par Aurelia, sa femme.
Alfredo... il faut que je vous en parle pour que vous compreniez cette belle rencontre.
C'est le "maitre du salar". Depuis 20 ans il est le seul habitant permanent de l'ile et donc du salar.
Plus jeune il participait avec son père au convoyage des caravanes. L'unique solution était de traverser le grand désert blanc pour se rendre à Uyuni, la ville de l'autre côté, où l'on pouvait échanger son quinoa, son sel, sa laine de lama etc.
La traversée se faisait à pied en 3 jours. C'est durant ces exténuantes traversées qu'Alfredo tomba amoureux de la solitude qui y règne, avant de s'installer sur Incahuasi au centre du royaume blanc. Sur l'Altipano la terre appartient à celui qui la travaille. Il est ainsi devenu maitre de son île et donc du salar ! Aujourd'hui encore, malgré la construction d'un petit complexe, il semble vouloir résister à l'envahisseur...
Il dépose sur la table les registres signés par les cyclotouristes et voyageurs à pied du monde entier qui sont passés ici depuis 2005. Il relis ému les témoignages et montre à Sylvio, son petit fils, les cartes postales collées : "regarde comme c'est beau le "canal du midi". Lui qui n'a jamais eu la possibilité ni les moyens de dépasser les frontières de son pays. C'est la planète entière qui vient à lui. Quel doux clin d'oeil.
Allez il faut que l'on parte, aujourd'hui nous attend la plus longue étape du voyage. Une 100aine de km !
Du sable nous repassons au sel. Tout doucement l'île disparaît derrière nous. Devant nous 70km de salar. Profitons de chaque coup de pédale car cet apres-midi nous devrons peut-être laisser pour toujours ce lieu mythique. Je regarde à droite, à gauche, derrière mais surtout devant pour profiter de cette sensation d'infini et de liberté.
Pause déjeuner à nouveau seuls au monde. On se construit avec les vélos notre petite cabane pour nous protéger du soleil.
Au moment de partir un 4X4 s'arrête. Nous rencontrons nos premiers touristes boliviens. Une famille avec 5 enfants. Ils nous demandent de faire quelques photos avec eux, c'est avec plaisir que nous posons.
Nous devinons au loin, comme un mirage, l'hotel de sel qui marquera la fin du salar. L'arrivée sous quelques applaudissements renforce cette sensation d'avoir comme accompli un exploit, une "traversée du désert" ;)
Le sel se transforme en terre. A Colchani une vielle dame est assise derrière 3 casseroles. Nous avons faim. Lama et riz pour 4h ! En dessert une mangue achetée 25ct à l'arrière d'un camion.
Les 23 derniers kilomètres seront en asphalte. Nous voilà à Uyuni.
Nous restons 3 nuits ici. Nous avons besoin d'un peu de temps pour préparer la suite, car vendredi nous repartons là où peu de cyclos s'aventurent...le sud Lipez. Je vous en dis plus un peu plus tard (j'hésite encore à y aller :-P)
Julien m'apprend tout pour devenir la parfaite aventurière (certes avec la marque des cuissards cà fait tout de suite moins amazone :-p )
Tout va bien, je garde les yeux et le coeur grands ouverts à chaque instant.









1 commentaire:

  1. Magnifique. Gaëlle a été chronométré à combien sur le 100km ?

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